Thaïlande-Cambodge, le franchissement du mur de la misère
Siem Reap (Cambodge), 7 février 2002.
Passer de la Thaïlande au Cambodge ne consiste pas seulement à se déplacer géographiquement d’ouest en est, cela revient à franchir brutalement le mur de la misère.
Le choc est violent.
Subitement, au poste frontière, la route asphaltée disparaît comme disparaissent les rutilantes voitures thaïs, les habits humbles, mais corrects, sur les gens et les maisons simples mais habitables. En quelques mètres apparaissent des cohortes de paysans tirant à bras d’homme des carrioles en bois bricolées par eux, tels des coolies chinois du XIXème siècle. Dedans, s’entassent des monceaux de légumes et parfois une femme et des enfants.
Ces paysans vont pieds nus ou portent de misérables tongues. Abasourdis, Rose et Raoul contemplent le spectacle, muets, tout en franchissant le poste de police puis l’immigration, puis la douane. Autour d’eux des gamins aux pieds nus, en haillons, mendient timidement. Les policiers font mine de les chasser comme hier le patron d’un restaurant thaï chassait des chiens errants.
La frontière franchie, Rose et Raoul sont embarqués dans un pick up (la taille d’une voiture normale mais avec un plateau à l’arrière) en même temps que douze autres touristes chacun muni d’un gros sac à dos. La répartition des charges s’effectue simplement : une couche de bagage, une couche de voyageurs. Avertis, Rose et Raoul avaient payé un supplément pour être à l’intérieur de la voiture à coté du chauffeur. Un choix que leur envieront très vite les douze occupants de l’arrière.
Les 150 Km qui séparent la frontière de Siem Reap (Angkor) sont parcourus en 5 heures sur une piste défoncée sur laquelle camions, voitures et motos lèvent un brouillard de poussière totalement opaque. Poussière dont bénéficient les paysans, leurs masures et les enfants qui jouent le long de cet itinéraire. Tout et tout le monde porte la couleur uniforme marron-rouge de la piste.
Tel est le premier contact de Rose et Raoul avec l’un des plus pauvres pays d’Asie du sud est.
Le Cambodge détient des records de mortalité infantile. Tuberculose, paludisme, diarrhée y font des ravages et ceux qui échappent à ces fléaux risquent de sauter sur l’une des six millions de mines qui les attendent au bord des chemins ou dans les rizières.
Pour ce qui de la langue, Rose est ravie. En cambodgien, merci se dit “oh! cong!”. Elle pratique le merci avec une aisance 100% toulousaine…