Que d’eau que d’eau
Le Chao Phraya n’est pas un long fleuve tranquille. Il est agité. Des vagues s’y croisent en tous sens. Elles sont générées par les nombreux bateaux qui sillonnent sa surface à pleine vitesse, transportant des passagers d’un quartier à l’autre dans le centre ville de Bangkok. Les Piche raffolent de ce mode de transport efficace et rapide. Un peu sportif aussi. L’embarquement et le débarquement de la foule des voyageurs s’effectue en moins d’une minute, bateau collé à quai, arrière plein pot, tenu par une unique amarre traversière. Départ en trombe.
Raoul est admiratif de la maîtrise des pilotes, situés tout à l’avant et qui accostent la poupe de leur bateau, 20 mètres en arrière d’eux, en une affaire de secondes.
Mais il y a plus chaud en matière de transport fluvial. Bangkok surnommée la Venise orientale compte un nombre incalculable de canaux. C’est le règne des bateaux taxi (taxis très collectifs). Ils sont plus petits et plus bas sur l’eau et bien plus difficiles d’accès. Le passager doit rapidement poser son pied sur un étroit plat bord mouillé, de 10 cm de large, puis enjamber une bâche et trouver le caillebotis du fond à l’aveuglette. Pas le temps de lambiner, tout le monde doit avoir embarqué dans la minute. Les marins qui aident à la manoeuvre sont casqués, preuve que c’est du sérieux ! Gaz à fond dès le démarrage, vitesse maximale en permanence mais comme le canal est plus étroit que le fleuve, les vagues d’étrave de deux bateaux taxi qui se croisent se percutent en arrosant largement autour d’elles. D’où l’existence de bâches de protection censées protéger les passagers.
Autre expérience nautique des Piche : une embarcation plate, lente, paisible pour visiter les canaux éloignés du centre ville. Las ! Ce sont les bateaux à longue queue (long tail boat) qui les arrosent sans vergogne en les croisant à plein régime. La longue queue n’est rien d’autre que l’arbre d’hélice qui, partant du moteur situé sur un pivot, plonge 3 ou 4 mètre en arrière de la barque. Pour se diriger, le pilote fait tourner l’ensemble solidaire moteur-arbre-hélice sur le pivot. Ces bateaux au comportement un tantinet sauvage sont néanmoins les plus beaux, avec leur proue qui se projette loin vers l’avant et se termine en supportant des bouquets multicolores.
Avec leur barquette peinarde, Rose et Raoul Piche ont franchi les écluses qui séparent le fleuve Chao Phraya des canaux. Des écluses qui, lors des récentes inondations catastrophiques ont servi à épargner les quartiers riches en noyant les quartiers pauvres.
Les Thaï ont une maîtrise de l’eau confondante.