Comment évaluer le danger ?
Quetzaltenango (Xela), 18 mars 2004
- On va vers le temple VI. Tu me lis ce que dit le guide ?
- Le temple VI, bla, bla, bla… sculptures uniques… bla, bla,bla. Il y a aussi un avertissement. “Sur le trajet de ce temple isolé, des vols et des viols ont eu lieu dans le passé. Bien que la sécurité ait été grandement améliorée, demandez à un garde de vous accompagner ou déplacez vous en groupe”
.- Nous sommes à mi-chemin et c’est maintenant que tu me dis ça ? s’exclame Rose
- Ecoute ! J’entends un moteur.
Un garde juché sur un quad arrive à hauteur des Piche.
- Bonjour, Monsieur le garde, lui lance Raoul, je lis dans mon guide qu’il y a des bandits ici. C’est vrai?
- Non! Pan, pan, pan… les bandits se sont enfuis, réponds ce dernier, en dégainant et en faisant mine de tirer en l’air avec son pistolet.
Des avertissements de ce type sont nombreux dans le guide-bible des voyageurs, le Lonely Planet. Ils ne sont ni tout à fait actuels, ni complètement dépassés. Cela dépend des lieux et des époques.
Ils fleurissent également sur le site du Ministère des affaires étrangères à l’attention des voyageurs. D’après ce site, même la Suisse ne serait pas si sûre…
Quant à l’information locale, au Guatemala, elle laisse songeuse surtout lorsqu’on lit le “Diario” dont la principale rubrique, “une” comprise, est exclusivement consacrée aux faits divers.
Les meurtres par armes à feu, les attaques de bus, les accidents de la route et la corruption des hommes politiques forment l’essentiel de l’actualité quotidienne. Les Piche y apprennent qu’à Guatemala Ciudad il se produit 40 agressions par jour et que les arrondissements à “hauts risques” sont les 3, 4, 5, 6, 7, 8, 12, 17, 18 (sur 18 en tout !).
“Passe, impair et manque” ! Clame à longueur de journée la faucheuse, incarnée en sinistre croupier.
Mais, non ! Les Piche ne sont pas disposés à jouer leur modeste existence à cette roulette là.
Alors, ils ne visitent pas Guatemala city, ne se promènent jamais la nuit après 20 heures, n’escaladent pas les volcans qui nécessitent des gardes armés, évitent les endroits isolés, se renseignent auprès des locaux et des autres voyageurs, etc. etc.
Car s’il est une information qui circule comme une traînée de poudre c’est bien celle concernant les agressions contre les touristes. Par chance, les Piche voyageant à l’inverse de tout le monde (du Panama vers le Mexique), il leur est aisé d’interviewer ceux qui viennent de là où ils vont.
De plus, le tourisme étant la seconde source de revenu du Guatemala les autorités renforcent les effectifs de la police touristique.
Ainsi, sur la route tortueuse conduisant à Chichicastenango, très prisé des touristes, la présence policière est manifeste. Rose se demande s’il faut s’en inquiéter (il n’y aurait pas de police si les lieux étaient sûrs) ou se sentir rassuré (les malfrats préfèrent sans doute agir là où la police n’est pas).
Les Piche en étaient là de leurs réflexions dans les zones montagneuses du Guatemala lorsqu’ils ont appris la nouvelle. De malheureux travailleurs, même pas des touristes, qui se rendaient tôt à leur travail venaient d’être pulvérisés par centaines. Et cela ne se passait pas en Amérique centrale mais à peu de distance de chez eux, dans une ville où ils comptent des êtres chers.
Alors sans tomber dans le fatalisme, les Piche se disent que la notion de risque est bien relative et que les déplacements en Amérique centrale ne sont peut être pas les plus inquiétants au monde.