Expérience limite au Burkina Faso
Allongés dans une immobilité totale, bras en croix, jambes écartées, nus comme des vers, les Piche fondent. Exsudant par tous les pores de leur peau, Rose et Raoul sont terrassés par la masse d’air à 38°C qui les enveloppe dans leur case du village de Tiébélé au Burkina Faso. A 23 h, Raoul se lève, sort de la case et découvre l’atmosphère fraîche de l’extérieur, 34°C !
Réveil de Rose : « Viens on va mettre le matelas sur la terrasse et on dormira à la belle étoile ! »
Nuitamment, les Piche se transforment en déménageurs, Raoul soulevant le matelas à bout de bras, Rose le hissant sur la terrasse. Allongés sous les étoiles, les Piche découvrent le bonheur d’un air enfin supportable. Au cours de la nuit la température descend même de 34°C à 32°C, leur donnant l’impression d’avoir froid… Il faut dire que dans la journée, ici, au sud de Ouagadougou, les journées sont à 42°C, soit quand même moins que les 44°C du centre ville de Ouaga.
Rose et Raoul Piche vivant pour la première fois ces températures extrêmes se disent qu’ils n’ont pas été fabriqués pour cela. Naturellement, de bonnes âmes leur expliquent « qu’ils ont de la chance, car en saison humide c’est encore plus chaud et plus insupportable ». S’ils ne croient ni en dieu ni au diable les Piche savent désormais que l’enfer existe, il se trouve quelque part à cheval entre le Mali, le Burkina et le Bénin (ce dernier s’apparentant plutôt au purgatoire).
Rose, Raoul, Chantal et Patrice sont ravis d’être logés à Tiébélé dans un « campement » (auberge) qui s’inspire de l’architecture des cases locales. On leur indique l’emplacement des douches et des WC. La douche est à l’eau courante au sens propre du terme : une jeune femme court leur apporter des seaux d’eau depuis la citerne, elle-même remplie à partir d’un puits situé à des centaines de mètres de là.
L’eau qui court dans des tuyaux est un luxe que ne connaissent pas les habitants du lieu, à l’instar de quelques milliards d’autres dans le monde.
La douche est agréablement partagée avec une poule et ses poussins. Raoul demande à la biquette rentrée avec lui de rester mais elle décline l’offre.
Quant aux WC ils sont également communs à bien d’autres sur la planète : une fosse, un trou, un seau d’eau. Ce sont probablement les seuls en Afrique de l’Ouest qui ne tombent jamais en panne.
Quant à l’électricité, elle existe, de 19 h à 22 h, grâce à un groupe électrogène. Le responsable du campement répond positivement à la sollicitation des Piche de réparer les ventilateurs se trouvant dans les cases. Le ventilateur de Rose et Raoul est dépanné. Sans pied, sans protection, posé en équilibre sur une table basse il n’attend que les doigts d’une main à saucissonner pour créer un peu d’animation. Le cas de l’autre ventilateur étant désespéré les amis des Piche n’ont même pas l’heur de profiter de l’électricité rafraîchissante d’avant le black out de 22 h.
Après cette nuit torride, Rose et Raoul retrouvent leurs amis au petit déjeuner. Ces derniers étuvés dans leur case, une nuit durant, ont petite mine. Le déjeuner est sur la table quand l’homme à la coiffe rasta qui les sert amène quatre sachets de poudre blanche ficelés très serrés dans un plastique transparent. Quatre paires d’yeux interloqués se fixent sur ces sachets ronds. Chacun se demande si quelqu’un a demandé un supplément. « Le sucre » précise alors sobrement le rasta.
Dommage, tant qu’à faire des expériences poussant leurs organismes à leurs limites, pourquoi pas celle-ci ?
Sagement, les Piche mettent un peu de sucre dans leur café et se préparent à retourner en enfer pour la journée. En rêvant au paradis des ventilateurs et des climatiseurs.
A bientôt